L’entrepreneuriat a le vent en poupe, plébiscité par les jeunes générations et de plus en plus encouragé par les pouvoirs publics. Beaucoup se rêvent en chef d’entreprise et il faut dire que l’aventure est attrayante. Créer sa boite est un espoir, la promesse de devenir autonome et indépendant, de réaliser ses rêves, de vivre une aventure humaine inoubliable. Alors, incités à « oser » dans un marché de l’emploi difficile et motivés par les « success story » d’entrepreneurs médiatiques, certains se lancent, et c’est tant mieux.
Mais la vie d’entrepreneur est jalonnée d’épreuves et de difficultés. Créer son entreprise est une aventure risquée et pleine de surprises. Je suis entrepreneur, j’ai créé et vendu une société et je dois dire que rien ne s’est passé comme je l’avais imaginé. Comme bien d’autres entrepreneurs, j’ai parfois connu des succès mais aussi des échecs, éprouvé des joies mais également des souffrances, découvert mes forces mais aussi rencontré mes limites.
Se préparer est indispensable avant de créer une entreprise mais savoir affronter les épreuves du parcours entrepreneurial l’est encore plus. Le sujet est vaste et il y aurait beaucoup à dire mais je vais ici présenter les principales épreuves que l’on rencontre lors du parcours entrepreneurial selon moi et proposer des moyens de les surmonter.
1. Remettre en cause son projet initial
Quand on se lance avec enthousiasme dans un nouveau projet, on le trouve souvent génial et on peut avoir tendance à s’y attacher fortement. La première épreuve de l’entrepreneur est de réaliser et de reconnaître que son projet d’origine est par nature imparfait, inadéquat et qu’il devra nécessairement évoluer, peut-être même de façon drastique. Il faut éviter un surinvestissement émotionnel pour être prêt à transformer, voire à détruire ce qu’on a créé. L’entrepreneur doit continuellement remettre en cause son projet pour l’améliorer en questionnant sa raison d’être autour de 4 questions (que j’ai déjà développé dans un autre article sur l’Ikigai) :
- Mon projet est-il une réponse à un besoin du monde?
- Mon projet est-il viable économiquement?
- Ai-je réuni les compétences nécessaires pour mener à bien ce projet?
- Mon projet me motive-t-il, m’intéresse-t-il, me procure-t-il du plaisir?
Pour faire évoluer son projet efficacement, il faut le confronter en échangeant le plus possible avec les autres, des clients potentiels, d’autres entrepreneurs, des acteurs du secteur que l’on cible. Il n’est pas agréable d’être remis en cause mais il n’existe pas de moyens plus efficaces que les « feed-back » pour s’améliorer, surtout quand ils pointent des faiblesses de votre projet. On doit toujours se demander pourquoi, essayer de retirer de chaque objection ou critique un enseignement, en dépassant la vexation qu’elle peut parfois provoquer : pourquoi on ne s’intéresse pas à mon produit? pourquoi on ne l’achète pas? pourquoi on ne l’utilise pas?
2. Prendre conscience de ses limites et de ses incompétences
La deuxième épreuve pour l’entrepreneur est de se rendre compte de ses incompétences, dont il n’a pas toujours conscience. C’est en faisant et en commettant des erreurs que l’on prend conscience de ses limites, des limites en terme de savoir, de savoir-faire et également de compétences humaines. On pourra par exemple réaliser qu’on est incapable de délivrer ce qu’on avait promis à ses clients parce qu’on est techniquement pas au niveau, qu’on n’est finalement pas doué pour la vente, ou bien qu’on a du mal à communiquer efficacement. Alors, face à cette prise de conscience, il y a 2 solutions, apprendre ou attirer des talents.
- Se former est à la fois une nécessité et une réalité quotidienne pour l’entrepreneur, qui apprend continuellement des situations sans cesse nouvelles qu’il rencontre. Mais puisque son temps est compté, il lui faut choisir les domaines sur lesquels se former, en privilégiant ceux qui lui semblent les plus utiles. Par exemple, un entrepreneur dont le projet est la création d’un logiciel pourra choisir de se former en développement informatique pour avoir le contrôle de son produit et être autonome. Certains préféreront combler leurs lacunes, d’autres renforcer leurs compétences existantes. Pour les compétences qu’on décide de ne pas acquérir mais dont on a besoin, il faudra attirer des talents.
- Attirer des talents est d’abord un gain de temps et d’efficacité. Vaut-il mieux passer un certain temps à se former dans un domaine pour atteindre un niveau moyen de compétence ou faire venir rapidement un talent excellent dans ce même domaine? Par ailleurs, savoir réunir autour de soi des gens intelligents et compétents est indispensable pour accomplir quelque chose de grand. Les plus beaux succès entrepreneuriaux se sont construits parce qu’il ont su attirer des talents. J’apprécie notamment cette citation de Steve Jobs qui nous dit en parlant d’Apple « Ça n’a pas de sens d’embaucher des gens intelligents pour leur dire quoi faire. Nous embauchons des gens intelligents afin qu’ils puissent nous dire ce qu’il faut faire. » Encore faut-il avoir les moyens de les faire venir. Pour attirer un talent, il faut être capable de lui proposer un échange équilibré, c’est à dire lui donner, en échange de sa compétence et de son travail, des compensations matérielles (salaire, capital, etc…) mais aussi des compensations humaines et relationnelles (intérêt du travail, responsabilités, autonomie, reconnaissance, ambiance…)
3. Faire face aux inconvénients de la liberté sans cadre
La troisième épreuve est paradoxalement aussi une des motivations principales de l’entrepreneuriat. Beaucoup se lancent dans l’entrepreneuriat pour être libre et indépendant, ne plus avoir de patron ni d’encadrement. Mais cette liberté est aussi une grande difficulté car elle impose à l’entrepreneur de créer lui-même son propre cadre et sa direction sous peine de se perdre. La liberté peut avoir comme effet:
- La procrastination : Il s’agit d’une tendance à remettre systématiquement au lendemain des actions. Le procrastinateur, qui est un « retardataire chronique », n’arrive pas à se « mettre au travail ». Ceci est un mal bien connu des créateurs d’entreprises qui peut avoir plusieurs explications. On peut procrastiner parce qu’on ne sait pas réellement ou on va, par peur d’avancer, par manque de confiance en soi, par perfectionnisme exacerbé ou bien simplement parce qu’on est un jouisseur cherchant à éviter les efforts et les contraintes. Le risque de procrastiner est encore plus grand si on travaille de chez soi. On peut passer des journées à ne rien faire, ou pas grand-chose, ce qui a pour conséquence de ralentir l’avancée de son projet et de développer un sentiment de culpabilité.
- La procrastinaction : c’est un terme que j’ai inventé pour définir un type particulier de procrastination. Le proacrastinacteur est lui très occupé, il met toute son énergie à accomplir…. des taches annexes au lieu de se préoccuper de l’essentiel. Il peaufine à l’extrême le design d’un site internet, il se dévoue à des projets mineurs qui l’intéressent mais ne sont pas primordiaux. Contrairement au procrastinateur, il a l’impression d’exercer pleinement ses capacités car il s’active mais n’avance pas beaucoup plus. Au fond de lui, il sait bien qu’il pourrait dédier son temps et son énergie à des taches à plus forte valeur ajoutée.
- Le surmenage : Si la procrastination et la procrastinaction apparaissent plutôt en début de parcours entrepreneurial, le surmenage apparaît plus souvent quand l’activité se développe. L’entrepreneur a une liste de taches à réaliser qui s’allonge mais ne s’organise pas assez et ne détermine pas de priorités. Débordé, il a tendance à considérer tout comme important et urgent, ce qui a pour conséquence l’épuisement et une baisse de l’efficacité.
Il apparaît d’abord essentiel de se fixer des objectifs clairs, quantifiés et limités dans le temps sur ce que l’on cherche à accomplir. Moins on sait précisément ce qu’on souhaite faire, plus on procrastine. Ensuite, il convient de se redéfinir un cadre de travail, c’est à dire un lieu adapté (si possible hors de chez soi), un emploi du temps régulier et des interactions sociales qui nous imposent de respecter des engagements. Enfin, s’organiser est indispensable. Je vous invite à lire à ce sujet mon article Reprendre le controle de son emploi du temps.
4. Lutter contre la solitude et l’isolement
Très nombreux sont les entrepreneurs qui se lancent seuls. C’est a priori plus facile, on ne dépend de personne, on est complètement indépendant et libre mais il y a des désavantages. La solitude peut être pesante et contre-productive. L’homme est un animal social et seul, il ne répond pas à son besoin vital de reconnaissance social et peut avoir tendance à broyer du noir. Il est également moins productif qu’a plusieurs. Pour les investisseurs, un entrepreneur seul est d’ailleurs souvent perçu comme un risque et ils préfèrent investir dans des entreprises dirigées par des équipes diversifiées et complémentaires.
Mais que les entrepreneurs soient seuls ou qu’ils aient des associés, ils vivent tous une forme de solitude qui découle de leur statut de dirigeant d’entreprise. Cette solitude provient notamment du poids des responsabilités et de leur rôle de manager. Chaque jour, un entrepreneur a des problèmes à résoudre, des questions auxquelles il doit répondre, ce qui l’oblige à devoir prendre de nombreuses décisions, rapidement, avec des conséquences sur son entreprise et sur les autres et sans en connaitre tous les tenants et les aboutissants. Pour sortir de cette solitude et prendre du recul, l’entrepreneur peut chercher à l’extérieur une respiration auprès de réseaux professionnels, participer à des salons et des événements liés à son secteur d’activité et également se faire accompagner par un mentor ou un coach.
L’entrepreneur doit aussi veiller à ne pas s’isoler et s’enfermer. D’abord, dès que possible, il devrait travailler hors de chez lui, dans un bureau. Il peut également multiplier les moments d’échanges avec ses employés, ses partenaires, ses clients. Enfin, il est indispensable qu’il entretienne une vie sociale active hors de son activité professionnelle, que ce soit pour voir des amis ou de la famille, faire du sport, participer à des activités culturelles.
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Fondateur de WINGMIND, David Chouraqui est conseiller et coach de dirigeants et d’équipes de direction. Il est spécialisé en audits RH, assessment des dirigeants et accompagnement des changements et des transformations.